
Comme promis, je continue sur ma lancée avec la suite de la progression sur le thème des émotions. On le sait aujourd’hui, plus les enfants sont à même d’identifier leurs propres émotions et de les mettre en mots, mieux ils savent les gérer tout en acquérant une meilleure empathie. C’est donc un travail important.
Je vous renvoie au précédent article, pour avoir le début de la progression.
Aujourd’hui, il reste à travailler :
— Le lexique émotionnel
— La gestion des émotions
Je rappelle que vous pouvez organiser votre travail de différentes façons : soit vous travaillez toutes les émotions dans chaque partie, soit vous ne travaillez qu’une émotion à la fois, en reprenant chaque étape de la progression proposée. Mais vous pouvez aussi privilégier l’une des six principales, en fonction du vécu de votre classe.
Le lexique des émotions
Rappelons cette évidence : plus le lexique est étendu, plus la pensée se complexifie et devient flexible. À terme, c’est la communication avec autrui qui s’en trouve facilitée, mais aussi avec soi-même, donc une meilleure compréhension de l’environnement. C’est par conséquent un aspect à ne SURTOUT pas négliger.
La couleur des émotions
Traditionnellement, les émotions sont toutes associées à une couleur dans l’inconscient collectif d’un groupe culturel.

On commence cette séance en demandant aux élèves laquelle ils donneraient à l’émotion nommée. Souvent, ce qu’ils évoquent correspond aux teintes habituellement attribuées, d’autant qu’ils connaissent presque tous le fameux film « Vice Versa », ou encore l’album « la couleur des émotions ».
Mais il arrive parfois que la majorité pense à autre chose que ce qui est attendu. Pour ma part, j’acceptais ces propositions et nous les retenions d’un commun accord.

Une fiche est ensuite distribuée à chacun, comme celle que vous voyez ci-contre. Les élèves doivent d’abord repasser le contour des nuages avec la couleur retenue pour l’émotion, et colorier l’intérieur du mot.
Enrichir le lexique
Le travail s’effectue ensuite par petits groupes avec une émotion pour chacun, ou en collectif, en fonction de l’organisation de votre progression. La consigne est la suivante : « Vous devez trouver le maximum de mots qui répondent à la question : Quand je ressens de la joie (ou de la tristesse, ou de la colère…), je me sens… »
Au moment de la mise en commun, si vous voyez que les propositions sont pauvres et peu nombreuses, apportez vous-même des mots que les élèves devront associer à la bonne émotion. L’intérieur des nuages sera rempli de ces mots.

NB : Il existe bien des listes prêtes à l’emploi, disponibles sur le Net. C’est pourquoi je n’ai pas jugé nécessaire d’en construire une supplémentaire. Voici quelques liens où vous pourrez en trouver.
— https://apprendreaeduquer.fr/ecrire-nos-emotions-aller-mieux/
— https://apprendreaeduquer.fr/lalphabetisation-emotionnelle-adultes-enfants/
Au CP, sélectionnez deux ou trois mots par émotion que vous copierez sur des étiquettes à photocopier. Les élèves les découperont et devront les coller dans les bons nuages. Au cas où vous travailleriez une seule émotion à la fois, les élèves pourront alors écrire eux-mêmes les mots trouvés. J’ai préparé une fiche-étiquettes, disponible en pdf si vous la voulez telle quelle, et en odt (libre office) si vous voulez la modifier.
Les nuages pourront être complétés au fil du temps, en fonction des lectures par exemple, ou des situations de classe rencontrées. Gardez-les précieusement, car ils seront un bon outil pour l’expression écrite.
L’intensité des émotions
Savoir situer sa propre émotion sur une échelle d’intensité est important car cela permet de relativiser en cas de besoin. En effet, être contrarié, fâché ou furieux ne demandera pas le même traitement. De même si je me sens inquiet, angoissé ou paniqué, je ne gérerai pas ma peur de la même façon.
Que ce soit au CP ou au CE1, vous proposez trois ou quatre mots, que les élèves devront « ranger » par ordre d’intensité, en commençant par le plus doux, et en allant vers le plus fort. Au CE1, les élèves les recopieront sur l’ardoise. Au CP, chaque mot sera copié sur une ardoise et l’enfant désigné devra venir les placer dans l’ordre. Les adjectifs étudiés, s’ils sont nouveaux pourront venir enrichir le nuage concerné.


Pour vous aider dans le choix des mots, j’ai cherché des tableaux tout faits sur Internet. Je joins deux liens contenant des listes intéressantes :
— https://situationplanetaire.blogspot.com/2011/03/quotient-emotionnel.html

Pour finir, une fiche d’exercice de synthèse, pour les CE1.
La gestion des émotions
Toutes les séances précédentes ont pour objectif d’arriver à cette dernière étape. Une fois que les enfants savent reconnaître leurs émotions et y mettre des mots, ils peuvent réfléchir à la meilleure façon de les gérer.
Malheureusement, s’il existe quantité d’albums tournant autour des émotions, je n’ai rien trouvé concernant la gestion et le contrôle de ces émotions au quotidien. Pas de vidéos non plus. Donc aucun support pédagogique pour traiter cet aspect délicat, vous allez devoir tout gérer par vous-même, avec beaucoup de délicatesse.
NB : si de votre côté vous avez trouvé quelque chose, je suis preneuse !

Pour ce faire, nous allons nous focaliser sur la colère. Pourquoi la colère ? Parce que c’est une émotion que les enfants connaissent bien, et surtout celle qui leur pose le plus de problèmes dans leurs relations aux autres.
Phase d’échanges

Avant toute chose, une question s’impose : la colère est-elle une bonne ou une mauvaise émotion ? Après avoir laissé parler les élèves, vous allez devoir leur expliquer qu’il n’y a ni bonne ni mauvaise émotion et que toutes ont une fonction. La colère sert à se défendre, à montrer qu’on ne peut pas tout accepter, donc à « défendre son territoire ». Ce qui peut poser problème, c’est la façon dont on l’exprime, et ce qu’on en fait.
(A ce propos, j’ai ajouté un paragraphe en fin d’article sur la fonction des émotions, que vous pourrez intercaler comme bon vous semble dans votre progression.)
Ensuite, vous allez déclencher une discussion à partir d’une autre question. Attention à bien amener la séance, de façon à apporter un climat sécure, exempt de tout jugement. La question est donc la suivante : « Que faites-vous quand vous êtes en colère ou que voudriez-vous faire ? Quelles sont vos gestes, vos paroles, vos réactions ? » Puis vous notez toutes les réponses au tableau, même au CP. Encouragez la prise de parole en acquiesçant, en confirmant parfois, en réassurant que les réactions nommées sont courantes (terme neutre). « Oui, c’est souvent ce qui se passe quand on est en colère ! »

Quand la liste est suffisamment longue, après avoir encore réaffirmé que tout ce qui est décrit est « normal », vous allez demander aux élèves de répertorier les réactions qui ne sont pas bonnes, pour eux et/ou pour les autres, et de dire pourquoi. J’insiste bien sur l’expression « bon pour soi » et « bon pour les autres », à ne pas confondre avec une bonne ou une mauvaise réaction. Les principales réponses seront :
— Ce n’est pas bon pour moi si ça risque de me blesser ou de me mettre en danger. Ce n’est pas bon non plus si je fais ou dis des choses que je regrette après.
— Ce n’est pas bon pour les autres quand ça peut leur faire du mal. Ou bien si ça les met aussi en colère, ce qui ne fait qu’aggraver les choses.

Faut-il alors réprimer sa colère ? Non, refouler ses émotions n’est pas bon. Vous pouvez comparer la colère à un ballon de baudruche qui se gonfle en fonction de l’intensité de l’émotion. Si on ne laisse pas échapper un peu d’air (c’est-à-dire si on ne l’exprime pas), il va continuer à enfler, enfler, jusqu’au moment où il finira par exploser en risquant de me blesser ou de blesser ceux qui sont autour.
Donc, nouvelle question : comment faire pour exprimer sa colère sans se faire mal et sans faire mal aux autres ? Je vous fais une petite liste de ce qui est sorti lors de mes interventions :
— Si je ressens un besoin irrésistible de frapper, pourquoi ne pas donner des coups de poing dans un coussin, en toute sécurité ?
— Si j’ai fortement envie de crier, soit je sors et je vais crier dans un endroit où personne ne m’entendra, soit je crie le nez dans un gros oreiller.
— Je peux dessiner ma colère ou simplement faire de gros traits rageurs qui petit à petit, vont contribuer à me calmer.
— Je peux l’écrire. Je peux même écrire des gros mots, je serai le seul à les voir. Quand ma colère sera calmée, je déchirerai la feuille avant de la jeter à la poubelle.

— Quand la tension commence à redescendre, penser à respirer bien fort. Respirer est une bonne méthode pour reprendre le contrôle, quelle que soit l’émotion. C’est même la meilleure !
— J’ai aussi trouvé une vidéo qui donne ce conseil : laisser sortir sa colère en faisant le lion. Crisper ses poings et tout son corps et laisser échapper un long et puissant rugissement, en se secouant.
— Seulement après, quand on ne se sent plus débordé par sa colère, on peut aller la dire le plus calmement possible, l’exprimer à celui qui l’a déclenchée, lui expliquer pourquoi et surtout lui dire ce qu’on a ressenti. Ce sont là les bases de la communication non violente : rappeler ce qui s’est passé, comment je l’ai reçu et ce que ça m’a fait. En dernier lieu, il est important d’exprimer ses besoins : « Je voudrais que tu t’excuses » ou « Je voudrais comprendre pourquoi tu m’as dit ça ».
savoir exprimer sa colère sans violence
Divisez ensuite la classe en groupes et donnez une situation à chacun, en leur demandant de trouver la bonne formulation pour exprimer son émotion, en respectant le schéma donné plus haut.
Exemple : J’ai prêté mon livre préféré à un copain et il me le rend tout abîmé. Une formulation adéquate serait : « Je t’ai prêté mon livre en te demandant d’en prendre soin parce que j’y tiens beaucoup. Tu me l’as rendu abîmé et tu ne me l’as même pas dit. Je l’ai découvert après. Ça m’a beaucoup attristé et ça m’a mis en colère parce que je me suis senti trahi. J’aimerais bien que tu m’expliques ce qui s’est passé, et que tu t’excuses. »
Exemple n°2 : J’ai glissé sur une plaque de verglas, je suis tombé à la renverse et les copains se sont moqués de moi. Formulation : « Je me suis fait très mal en tombant. Au lieu de venir m’aider, vous avez rigolé. J’ai trouvé que ce n’était pas gentil, je me suis senti seul. Ça m’a attristé et ça m’a fâché. Je voudrais que vous compreniez comme ça m’a blessé. »
Trace écrite

J’ai trouvé quantité de roues de la colère sur Internet, et je me suis dit qu’il serait intéressant d’en construire une personnelle à chacun. En effet, boire un verre d’eau peut aider un enfant, tandis que ce sera inefficace pour un autre. Vous allez donc distribuer une roue vierge à chacun, accompagnée d’une autre, avec de petites icônes à choisir.
Au CP, les élèves choisissent celles qui leur semblent le plus adaptées à leur personnalité, les découpent et les collent dans les compartiments. Au CE1, ils accompagneront leur collage d’une courte phrase à copier sur les lignes pointillées. Vous en aurez auparavant établi la liste ensemble. Exemple : je fais le lion, ou je serre très fort ma boule de colère…

NB : vous pouvez remplacer le bon de colère par le fait de déchirer une feuille de journal en tout petits morceaux, ça fait moins de photocopies !
Pour finir, comme promis, voici un petit inventaire des fonctions des autres émotions.
La fonction des émotions
Les émotions nous donnent des informations sur l’environnement. Souvent, elles servent à nous alerter et à nous inciter à réagir pour notre protection. Elles transmettent aussi des renseignements utiles aux autres, sur ce dont nous avons besoin.
— La tristesse nous informe sur ce qui nous manque, sur les pertes, les désirs non réalisés. Elle indique aux autres que nous avons besoin de soutien, de consolation.
— La joie donne envie de partager ce qu’on vit de bon. Elle a une dimension sociale importante (fonction de communication).
— La peur s’exprime en cas de danger et induit trois types de réactions : la sidération, la fuite ou l’attaque. Elle a une fonction de protection. Si on n’avait jamais peur, ça voudrait dire qu’on n’a pas conscience des dangers, donc on ne saurait pas se protéger.
— La surprise nous alerte sur quelque chose d’inhabituel et nous incite à être vigilant. En général, elle est suivie d’une autre émotion : la joie si j’ai reçu un cadeau, la peur si j’ai été surpris par un bruit inquiétant, la colère si c’est un copain qui vient de me faire une mauvaise farce.
— Le dégoût a une fonction de protection. Si je suis dégoûté par un fruit moisi ou par une mauvaise odeur, ça veut dire que ce n’est pas bon pour moi. Je ne vais pas avoir envie d’y goûter.
Un grand merci pour ce travail qui nourrit grandement celui que nous préparons !😘
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Bonjour,
Je vous remercie pour ce travail très complet.
Voici une ressource bibliographique qui pourra vous aider pour travailler comment gérer ses émotions au quotidien !
https://livre.fnac.com/a16431609/Aurelie-Philemy-Mes-amies-les-emotions
Audrey
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Magnifique travail ! Une approche très pertinente ! Merci infiniment !
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Je viens de finir la première partie en classe: je suis conquise! Merci infiniment pour ce travail approfondi!
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Super ! Merci pour ton retour Magalie.
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Très intéressant! Je vais tester en classe de CE1, merci beaucoup
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Merci beaucoup pour ce partage. C’est vraiment très intéressant.
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Merci Sandra, et j’espère surtout que ça vous sera utile.
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Quel magnifique travail!!!
Un grand merci!!
J’ai découvert plusieurs livres autour de la gestion émotionnelle pour enfants en Espagne:
“De mayor quiero ser feliz”
“Creo en mí”
(Auteur: Anna Morató)
Une autre formidable écrivaine est Susana Isern. Mon préféré chez elle: Le grand livre des super pouvoirs.
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Merci beaucoup Paula, pour ces références qui sans doute en aideront plus d’un.
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